Énergique et motivée comme toujours, la jeune femme s’était donnée corps et âme à son travail. Son père, propriétaire de l’exploitation d’oiseaux magiques dans laquelle elle travaillait pour acquérir de l’expérience, se trouvait enchanté de collaborer avec sa fille. Il faut dire qu’ils avaient toujours été particulièrement proches grâce à cette passion, qui les dévorait tous les deux. Une complicité que la jeune espagnole ne pouvait qu’apprécier même si elle avait découvert un sombre secret, qui pourrait mettre en péril sa relation avec lui. Depuis qu’elle avait été mise au courant de celui-ci, elle n’avait de cesse de se tourmenter à ce sujet, même si la plupart du temps, elle préférait omettre ce détail, qui mettait pourtant en jeu toute son existence et son histoire personnelle. Il n’était pas son père biologique, sa mère ayant trompé son père peu de temps après leur mariage. Cette vérité qu’elle avait découverte dans les pages d’anciennes lettres échangées par son père avec sa mère avait été résolument déroutante à une époque de sa vie où elle se sentait déjà perdue. Une nouvelle dont elle se remettait péniblement, même si elle avait repris le contrôle de sa vie.

Un fait qu’elle devait notamment à sa relation fleurissante avec le bel auror qu’elle fréquentait depuis quelques mois. Elle était loin d’imaginer lors de leur rencontre qu’une telle histoire merveilleuse et apaisante allait découler de cette folle nuit qu’ils avaient partagée ensemble. Quoi qu’il en soit, elle avait retrouvé un sourire doux et sincère aux côtés de cet homme. Il avait un charisme et une aura, qui avait un fort pouvoir sur elle, et ce, depuis leur rencontre. Un bienfait qui semblait réciproque, remarquant aisément que le jeune homme semblait de plus en plus heureux. Ce qui ne pouvait que la ravir également. Elle se préparait donc à rentrer au sein de la capitale magique pour retrouver son petit chez soi. Comme toujours, elle avait profité d’être au domaine de ses parents pour prendre une douche bien méritée afin de s’habiller dans des vêtements plus confortables. Elle venait donc de quitter le domaine de sa famille pour transplaner devant le bâtiment de son logement. Le cœur léger, le corps fatigué, elle n’avait qu’une hâte : retrouver son petit cocon et se poser auprès de son petit ami pour discuter de leur journée respective. Sans doute que Yong Woo avait passé sa journée à se reposer, puisqu’il était en repos.

Elle ne put donc qu’être surprise de le retrouver en pleine lecture de ce qu’il semblait être un dossier. Sagement assit et concentré dans sa lecture, il se retrouvait être entouré par des dizaines de parchemins, repartis un peu partout autour de lui. N’était-il pas en jour de repos ? Elle vint rire doucement à cette vision. <« Eh bien, moi qui pensais te retrouver à flâner tranquillement sur le canapé, une bouteille de bière à la main, je serai presque déçue… » Lança-t-elle dans un ton faussement boudeur alors qu’elle venait retirer sa veste pour prendre une bière pour l’accompagner. En effet, elle avait bien remarqué qu’en dépit du fait qu’il était concentré sur un dossier, il semblait s’être octroyé le droit de boire une bière. Pendant ce temps-là, Yong Woo avait rangé ses papiers pour le remettre dans son dossier. Une attention qui la fit sourire alors qu’elle venait se déchausser pour venir se caler à ses côtés, intriguée. C’était la première fois qu’il ramenait un dossier à la maison. Elle était venue lui voler un doux baiser, laissant sa main libre caresser la barbe naissante alors qu’elle murmurait contre ses lèvres. « Bonsoir, toi ! Je vois qu’on travaille même un jour de congé, moi qui m’attendais à un beau diner aux chandelles, vous me décevez, Monsieur Park. »

Elle vint rire, laissant son souffle caresser les lèvres de son amant alors qu’elle glissait sa main contre sa nuque, ses phalanges glissant dans l’ouverture de sa chemise pour venir frôler la naissance de ses pectoraux. Elle le fixait de son regard tentateur alors qu’elle venait ajouter. « Je suis sûre qu’on peut trouver un moyen de négocier. » Elle tira la langue avant de venir s’éloigner de lui pour adopter une posture plus conventionnelle et boire une gorgée de sa bouteille, lui lançant un regard cocasse et taquin, comme elle savait si bien les faire.

TENUE : 01

En toute sincérité, elle s’était attendue à trouver son petit ami en train de flâner avec une bouteille à la main. Après tout, cela semblait évident pour elle qu’un homme ne pouvait passer que sa journée de repos à se décontracter, avachi sur un canapé en sirotant une bonne bière. À la rigueur pour les moins flemmards, on pouvait ajouter un bon livre qui les aiderait à passer le temps ou une musique agréable pour accompagner le tout. Seulement, ce n’était même pas le cas. Au contraire, Yong Woo se trouvait plongé dans un dossier et cela n’avait pu que l’amuser, tout autant que la surprendre. Après tout, il était le premier à avoir souhaité être de repos pour se poser un peu tranquillement. Il avait souri à son arrivée. Il lui indiqua la bière comme pour l’informer qu’il n’était pas totalement hors sujet vis-à-vis de l’image qu’elle s’était attendue d’avoir de lui. « Cela ne m’étonne même pas. » Lança-t-elle alors qu’elle venait s’asseoir à ses côtés pour lui voler un doux baiser, en douce petite amie qu’elle était.

Elle le taquina comme à ses habitudes et celui-ci participait volontiers à celles-ci. Il riait doucement, le regard brillant et amusé tout en la dévorant du regard, séduit par ce qu’elle lui proposait. Il serait ravi de négocier sa punition pour ne pas avoir préparé un magnifique repas. Il avait oublié momentanément qu’elle était une grande gourmande. Shana sourit en buvant une gorgée de sa bière, souriant au contact des phalanges dans ses cheveux. Cette caresse était agréable alors qu’il venait déposer un baiser sur sa joue avec douceur. Il n’avait pas pensé à faire le repas, mais il avait acheté de PizzaGic dans la matinée. Ce n’était pas du grand luxe et s’en excuser. Yasushi, qu’elle reconnut comme étant le coéquipier de son amant, était venu le voir pour lui demander de l’aide sur un dossier, qu’il n’avait pu refuser. De ce fait, ce n’était pas vraiment du travail. « Pour la peine, tu seras obligé de m’inviter au « Spade's Heart »… Une pizza… Franchement. À croire que monsieur se repose sur ses lauriers… » Son expression était sérieuse, boudeuse alors qu’elle haussait les épaules. Si ses prunelles ne pétillaient pas de malice, elle était convaincante. Elle finit par inspirer, dépitée.

« Mais dans ma grande clémence, je te pardonne. Tu as de la chance que je sois un garçon manqué. Une PizzaGic me convient totalement, à condition que ça soit toi, qui la fasses cuire. » Elle tira la langue, le regard espiègle alors qu’elle venait jeter un bref regard sur les documents qui s’étalaient sur la table. Son expression se fit plus sérieuse, un instant alors qu’elle venait boire une nouvelle gorgée de sa bière, murmurant. « Cela m’a l’air très sérieux… C’est pour le travail ou c’est privé ? Tu avais l’air très concentré quand je suis arrivée, je suppose que c’est quelque chose qui te tient à cœur. Je peux donc comprendre. Tu peux m’en dire plus ou c’est un secret ? » Elle vint lui sourire doucement alors qu’elle le regardait avec douceur. « Si tu as besoin d’un peu de calme, je peux faire un peu de ménage en attendant ou autre. Ne te sens pas obligé d’arrêter pour moi… » Elle vint lui faire un clin d’œil venant lui voler un doux baiser du coin des lèvres. Elle pouvait comprendre qu’il ne souhaite pas en parler. Après tout, c’était une histoire entre Yong Woo et son ami et elle ne voulait pas empiéter ou être trop insistante. C’est pour cela qu’elle vint s’éloigner doucement de lui pour boire une nouvelle gorgée de sa bière, attendant patiemment sa réponse.

Shana était de nature curieuse. De ce fait, il était évident que ce dossier qui trainait sur la table basse du salon l’intriguait énormément. Même s’il n’était pas rare de voir Yong Woo travailler sur un dossier en rentrant, c’était autre chose de le voir travailler dessus durant ses congés. D’autant plus que cela avait un lien direct avec son ami, Yasushi. Du moins, c’était ce qu’elle semblait entrevoir en vue de ses paroles. Elle lui avait donc posé la question spontanément, comme à ses habitudes, n’attendant pas vraiment de réponses de sa part. En effet, elle ne voulait pas l’obliger à s’exprimer sur le sujet si cela était un secret ou risquait de le mettre dans une situation délicate. De nature compatissante, elle était en mesure d’accepter qu’il ait des secrets pour elle afin d’honorer sa loyauté envers un ami ou un proche de sa famille. Elle ne pouvait que respecter cela, lui proposant de s’occuper à faire le ménage s’il avait besoin d’un peu de calme, n’étant pas obligé de s’arrêter pour elle. Yong Woo lui souriait, venant boire une gorgée de sa bouteille de bière avant de lui informer que ce n’était pas vraiment du travail. Tout comme elle le pensait, il affirma qu’il s’agissait d’une affaire privée, mais qu’il n’était pas sûr de pouvoir lui en parler.

Elle vint hocher la tête, comprenant parfaitement sa situation et se promit de ne pas en demander plus, mais Yong Woo semblait néanmoins déterminer à s’expliquer, du moins dans une certaine mesure. Il n’était pas supposé avoir le droit de faire cela, car ce dossier était classé et qu’ils ne devraient pas revenir dessus légalement. Seulement, il y avait des choses qui clochaient pour eux. Des éléments qu’il devait conserver secrets, ce qu’elle comprenait en venant sourire au doux rire qu’il vint lui lancer. Il ne pouvait pas refuser cela à Yasushi. De ce fait, il était vrai que l’affaire lui tenait à cœur, à tous deux. Yasushi savait et c’est pour cela qu’il était venu le voir, ils se connaissaient depuis fort longtemps, bien avant d’être coéquipier et il n’avait pas douté qu’il voudrait l’aider sur cette affaire, même s’ils s’étaient un peu éloignés avec le temps. Elle le sentait un peu fébrile à cet instant, le sentant légèrement gêné et hésitant. Shana comprit qu’il avait dû se passer quelque chose, mais se garda bien d’aborder immédiatement le sujet, voulant laisser à Yong Woo, le soin de reprendre le fil de ses pensées. Elle répondait à son sourire, celui-ci se faisant compatissant et doux, chaleureux également.

Il finit par reprendre la parole, lui indiquant qu’elle ne devait pas le savoir comme elle était espagnole, mais cette affaire avait fait beaucoup de bruit au Japon. En effet, les parents de Yasushi ont été emprisonnés à Azkaban pour le meurtre de plusieurs moldus, bien qu’ils clament leur innocence. Yasushi restait convaincu qu’ils n’y étaient pour rien, qu’on leur avait tendu un piège et il en était aussi persuadé, même si tous les éléments étaient contre eux. Yong Woo les connaissait bien également, il allait souvent chez eux quand ses parents étaient en mission. Il était juste impensable qu’ils eussent pu commettre une telle chose. Il semblait troubler, laissant planer un silence qui venait lui confirmer. Shana l’observait avec douceur, venant glisser sa main dans ses cheveux en douceur. « Je comprends mieux… » Vint-elle seulement murmurer dans une ton doux alors qu’elle ajoutait.

« C’est tout à fait légitime que ce dossier vous tienne à cœur. J’imagine à peine l’horreur qu’a dû vivre ton ami. C’est atroce. Perdre son père et sa mère de la sorte. J’ose à peine l’imaginer, mais je suis sure qu’avec toi à ses côtés, en tant qu’ami, cela a dû être plus facile à vivre. Quand on perd sa famille, les amis sont toujours d’un profond réconfort et nous permette d’avancer. » Elle lui souriait avec douceur, venant glisser ses doigts contre sa nuque avec tendresse. Elle le sentait tendu et mal à l’aise. « Par contre, je ne comprends pas. Tu dis que vous vous êtes perdu de vue durant quelque temps. J’aurai tendance à penser que ce genre d’épreuve renforce l’amitié qu’autre chose. Il s’est passé quelque chose ? »

Il n’y avait aucune méchanceté, ni aucun jugement dans ses paroles. Elle se trouvait simplement intriguée et curieuse, ayant la sensation qu’il lui manquait un détail pour comprendre toute la situation. C’était la première fois qu’elle sentait Yong Woo si troublé, cela l’interrogeait, mais peut-être s’aventurait-elle sur un terrain dangereux. « Enfin, oublie si tu ne veux pas répondre ou quoi que ce soit. » Elle vint rire, se mordant la lèvre, gênée. « Je suis curieuse de nature, mais peut-être que tu ne veux pas en parler. Je ne veux t’obliger en rien, bien entendu. » Pour ponctuer ses phrases, elle était venue lui sourire doucement en venant déposer un baiser contre sa joue, le regard tendre, lui indiquant qu’elle comprendrait s’il ne voulait pas aborder un tel sujet.

Shana osait à peine imaginer l’enfer dans lequel avait été plongé l’ami de Yong Woo. Être ainsi discrédité, expédié sur la place publique devait être une expérience douloureuse. Shana en avait une idée. On l’avait montré du doigt lorsqu’elle avait rompu avec Ruben. Même si sa grossesse était restée un secret qu’elle avait conservé au fond d’elle, sa rupture avec son fiancé n’était pas passée inaperçue aux yeux de toute l’école. Elle avait souffert des commérages, ne venant même pas s’en défendre lorsqu’une des admiratrices de son ex-fiancée l’insultait sans connaitre tous les éléments de l’histoire. Même si les gens ignoraient la véritable raison de leur rupture, elle lui était imputable et elle s’était efforcée de l’accepter, même si cela avait été difficile. C’était si lourd à porter, qu’elle avait préféré quitter l’Espagne, son pays d’origine pour se faire transférer en Corée du Sud, dans l’espoir de s’y reprendre et chasser son plus lourd fardeau, sans y parvenir réellement. Si elle était aujourd’hui en mesure de se sentir si légère, c’était grâce à cet homme qui se trouvait à ses côtés. Sa douceur, son humour, sa compréhension rendaient leur relation bienfaisante. Elle semblait guérir son cœur à ses côtés, celui-ci se sentant plus heureux et en mesure de se dégager de ses tourments qui l’étreignaient. Elle parvenait à tourner la page lentement et cela était rendu possible grâce à cet homme.

Elle n’avait aucun doute sur le fait qu’il avait dû être d’un profond soutien pour son ami. Elle ne voyait aucune raison légitime, qui puisse imaginer le contraire. Elle était donc certaine de ses paroles, disant que son ami avait dû réellement apprécié son amitié à cette époque, comme elle avait été heureuse de profiter de l’affection débordante de Suk Hee durant celle où elle s’était retrouvée seule face à tous. Elle sentait néanmoins Yong Woo se tendre à celles-ci, soudainement plus mal à l’aise. Sans doute que ce signe évident de mal-être aurait dû l’alarmer, mais plongée dans ses pensées, la suite de ses paroles, elle n’en fit nullement la constatation et se bornant à mettre les pieds dans le plat. Elle vint poser la question fatidique, sans s’en rendre compte, juste par curiosité, même si elle ne le forçait nullement à répondre. Elle lui laissait toujours une porte de sortie, sachant pertinemment qu’il y avait des questions délicates qu’on ne désirait pas répondre. Elle imaginait que ça devait être quelque chose de si sérieux pour qu’ils en soient venus à couper les ponts. Cela l’intriguait néanmoins. Elle lui souriait donc avec douceur, venant déposer un baiser sur sa joue. C’est à cet instant qu’elle perçut le malaise de son petit ami. Celui-ci vint se mordre la lèvre, se grattant la nuque de gêne.

Shana vint naturellement le regarder avec douceur et une légère inquiétude, plus intriguée et soucieuse qu’auparavant. Ce n’était pas simple. Du moins, il n’avait pas tenu son rôle d’ami cette époque. Un aveu qui semblait difficile pour le jeune homme, qui était venu se mordre les lèvres. Il n’avait pas été là pour lui, il n’avait pas su rester à ses côtés. Il n’avait pas pu. Le ton de la voix de l’auror se fit plus faible, plus saccadé au fil de ses paroles. Ce n’était pas à cause de ses parents, ni du jugement. Ils s’étaient déjà éloignés avant que ça n’arrive, même si quelque chose s’était vraiment brisé à ce moment-là. Shana comprenait que la raison le tourmentait. Il était assez évident de le voir, le regard de Yong Woo tremblé, fixant inexorablement le dossier qui se trouvait face à lui, nerveux et gêné. Sa respiration se fit plus fort et elle n’avait pas trop de mal à comprendre que ceci était dû à l’accélération de son cœur au creux de sa poitrine, résolument stressé. En réalité, il était celui qui s’était éloigné de lui. Il l’évitait autant qu’il le pouvait, car il sortait avec une fille et il ne pouvait pas supporter de les voir ensemble. Cela le rendait malade de les voir ensemble, alors moins il les voyait, mieux il se portait. Il savait qu’il aurait dû se réjouir qu’il ait une petite amie, qu’elle le rende heureux en plus tant il était vraiment bien avec elle.

Seulement, tout ceci l’avait rendu fou de jalousie, car pour lui, elle lui volait son meilleur ami. Yasushi ne s’en rendait pas compte, mais ils se voyaient de moins en moins tant cela le rendait si malheureux de les voir ensemble. Il souffla dans un murmure qu’il était très attaché à lui, bien trop, et Shana comprit immédiatement où il voulait en venu. Le visage baissé, elle pouvait y lire son émotion, son trouble, son malaise. Elle comprenait qu’il en avait été amoureux et qu’il avait souffert de cela, de cette situation. Elle se sentit émue par le trouble de son ami, la mésaventure de cet amour qui n’avait pas pu être vécu. Elle laissa une de ses mains glisser contre la nuque de son petit ami, en douceur, dans un geste maternel et affectueux. Elle laissa ses doigts glisser dans sa chevelure avec tendresse. « Je comprends mieux. » Souffla-t-elle en douceur, laissant son autre menotte glisser sous le visage de son petit ami pour le relever, qu’il la regarde. Elle lui souriait faiblement, troublée par son aveu. Elle comprenait sa douleur de ne pas avoir pu aimer, chérir une personne comme on l’aurait souhaité. Elle aurait voulu être l’exception de Joaquin, elle l’avait été durant une courte nuit avant qu’il ne vienne briser son cœur et toute la magnificence de leur relation. Elle comprenait cette douleur, cette impuissance à pouvoir se dégager de celle-ci, prisonnière à jamais de celle-ci. Même aujourd’hui, auprès de lui, celle-ci venait la hanter. Ce n’était pas si simple de passer au-dessus d’un amour passionné.

Elle avait cru aimer Ruben d’un amour sincère et précieux. Il avait tout d’un prince charmant et il l’était : résolument doux, bienveillant, tendre et passionné. Pourtant, malgré tout l’amour qu’elle avait pu lui porter, inconsciemment son cœur avait reporté ce besoin d’être une princesse sur l’Espagnole, pour qu’il fasse d’elle une femme, sachant qu’elle ne pouvait rien escompter de celui qui occupait une place bien trop importante. Elle lui caressa le visage avec douceur. « Je peux comprendre que tu n’as pas pu rester, que tu étais trop attaché pour pouvoir le faire, car sinon tu aurais trop souffert. Je le comprends d’autant plus, que j’ai vécu plus ou moins la même chose, même si c’est tout aussi complexe que l’histoire entre Yasushi et toi. » Elle lui sourit doucement, venant lui voler un léger baiser en murmurant. « Tu ne dois pas t’accabler de la sorte. Tu as le droit d’avoir été faible, que ton cœur n’est pas supporter certaines choses. Tu as désormais une chance de retourner auprès de lui en tant qu’ami. C’est déjà merveilleux, tu ne penses pas ? » Inconsciemment, c’était ce qu’elle désirait. Une deuxième chance pour retourner auprès de Joaquin, de retrouver ce lien merveilleux qu’ils avaient, mais c’était trop tôt, bien trop tôt. Quand bien même se trouvait-elle avec Yong Woo, elle n’était pas encore prête à tirer un trait sur ce sentiment qui avait tant grandi en elle et qui l’avait tant meurtri. Même aujourd’hui, il souffrait en silence, même si la douceur et le bonheur que lui procurait Yong Woo aider à panser ses cicatrices. Elle voulait être en mesure d’en faire autant avec les siennes.

L’aveu de Yong Woo la touchait profondément. Elle avait conscience que c’était un sujet bien délicat pour le jeune homme. Même s’il le cachait, elle se rendait compte qu’il n’en était pas encore guéri. Son regard le trahissait, emprunt de cette fébrilité, tristesse et culpabilité. Elle y était sensible, ressentant ses émotions également, cette sensation de vouloir avancer sans y parvenir réellement. Elle avait essayé de le faire seule, mais elle n’avait fait que tourner en rond, marchant sur place sans même avancer d’un pas. C’était sa rencontre avec lui, qu’il lui avait permis d’avancer, de commencer à croire en l’amour. Elle se sentait terriblement bien avec lui, libre dans une certaine mesure. Il était compréhensif, doux et aimant. Ils semblaient en symbiose parfaite et c’était si rassurant de l’avoir. Dans une certaine mesure, par sa douceur et son affection, il venait panser ses blessures, lui faire croire de nouveau en ce sentiment qui avait tant effrité son cœur. Il était difficile de guérir de ce type de blessure et elle comprenait aujourd’hui pourquoi leurs deux âmes s’étaient accordées de façon si spontanée et naturelle. Seuls le temps, l’amitié et un nouvel amour pouvaient expier celle-ci et la faire disparaitre à jamais. Elle espérait que leur relation permettait au jeune coréen d’avancer, tout autant que sa présence parvenait à la rendre heureuse.

Le sourire doux qu’il lui offrit lui faisait comprendre qu’il avançait doucement. Il considérait que c’était merveilleux. Il ne pensait pas que Yasushi serait aussi compréhensif avec lui ou qu’il lui pardonnerait si facilement. Il avait pu lui en parler et ça l’avait vraiment libéré d’un poids. Il avait beaucoup de chance, car il était vraiment quelqu’un de bien. Il se trouvait particulièrement attendri en disant cela, Shana n’avait aucun doute tant les prunelles de Yong Woo se trouvaient brillantes. Il lui souriait en disant cela, mais elle voyait bien qu’il était encore troublé par tout cela. Il lui avoua qu’il n’arrivait pas à en faire qu’il avait pu le faire pour lui, mais il était heureux qu’il lui accorde une seconde chance. Après tout, il l’avait abandonné au moment où il avait le plus besoin de lui. Elle le vit se mordre la lèvre en venant caresser son visage avec douceur. Un contact qu’elle savourait avec bien-être, lui rendant le sourire qu’il lui tendait. Il lui murmura qu’il était désolé d’apprendre qu’elle ait pu souffrir comme lui d’une telle histoire. Cela expliquait sans doute les raisons qui faisaient qu’ils s’entendaient aussi bien et soient sur la même longueur d’onde. Une remarque qui la fit sourire dans un fin rire. Elle se laissa embrasser, venant lui rendre son baiser délicatement en murmurant : « Je me disais la même chose, justement. » Elle vint rire doucement de nouveau en glissant sa main dans celle de Yong Woo. Elle laissa sa paume retrouver celle de son petit ami avec douceur, se demandant si elle devait s’aventurer sur le terrain.

Elle hésita, ne sachant pas par où commencer, ni même si elle devait le faire. Pourtant, inconsciemment, elle se rendait compte qu’il s’était ouvert à elle et elle voulait lui rendre la pareille. Quand bien même était-ce encore un sujet sensible pour elle, que cela ne renvoyait pas une belle image d’elle, elle pensait que c’était ce qu’il fallait faire. Elle jouait donc avec les doigts de Yong Woo en silence, le temps de réfléchir à tout cela. Elle vint se mordiller la lèvre avant de reporter son regard sur Yong Woo pour lui sourire. « Tout comme toi, je n’ai pas eu le meilleur rôle dans mon histoire. » Elle vint rire faiblement, le regard un peu brillant, tourmenté par les souvenirs qui refaisaient surface. « Ce n’est pas un sujet facile à aborder. J’y suis encore sensible et je crois même qu’encore aujourd’hui, j’ai du mal à accepter tout ce qu’il s’est passé... » Elle inspira profondément pour tenter de se donner du courage, avouant faiblement :

« Je suis loin d’être une femme parfaite et je l’ai compris le jour où sans le vouloir, j’ai fait du mal à l’homme que je pensais aimer, chérir et à qui j’avais donné ma main. C’est quelque chose qui me hante et me pèse encore aujourd’hui. » Elle soupira doucement, le regard brillant, le cœur serré. « J’ai trahi une personne qui m’était chère comme j’ai été trahi par l’homme que j’aimais de tout mon cœur. Oui… » Elle se mordit la lèvre. « J’étais amoureuse de deux hommes. Deux hommes que je pensais aimer pour des raisons différentes. L’un était mon amant et l’autre mon meilleur ami, mon cousin. Je pensais que cette frontière était bien délimitée, mais j’avais tort. Je l’ai compris un soir, après une soirée trop arrosée, dans ses draps. Cette nuit a totalement bouleversé toute ma vie, notre vie. Le réveil fut catastrophique et aujourd’hui encore, je me souviens du bruit qu’a fait mon cœur face à ses mots. C’était comme s’il s’était brisé en mil morceaux, comme si je n’étais qu’une de ces vulgaires conquêtes qui ne méritaient nullement son attention. »

Elle déglutit doucement, les larmes aux yeux, terriblement fébrile alors qu’elle serrait plus fermement sa main dans celle de Yong Woo, le cœur lourd. « Il était l’homme de ma vie, celui à qui je pouvais ouvrir mon cœur sans crainte. Encore aujourd’hui j’ignore ce qu’il s’est passé, tout comme les raisons qui l’ont conduit à agir de la sorte, mais ça fait mal. Ce jour-là et les mois qui ont suivi n’ont été qu’un enchainement d’obstacles et de déceptions et même aujourd’hui, j’ai encore énormément de mal à m’en remettre. J’ai appris à masquer mes blessures pour devenir plus forte, mais je n’ai fait que me voiler la face. » Elle inspira profondément pour tenter de reprendre contenance, venant lui sourire doucement. « Cependant, je suis heureuse d’avoir croisé ta route, Yong Woo. Aujourd’hui j’arrive enfin à avancer et c’est grâce à toi. Je me sens bien avec toi et ta présence me fait énormément de bien. Je suis heureuse de t’avoir à mes côtés. » Elle laissa sa main libre caresser son visage avec douceur, son pouce frôlant ses lèvres alors qu’elle murmurait. « Tu me redonnes foi en l’amour et c’est pour cela que j’aime être avec toi. Tu panses mes blessures et j’espère être digne d’en faire autant pour toi. » Elle mordillait la lèvre, le regard tendre, mais fébrile alors qu’elle venait lui voler un baiser avec tendresse. Elle se sentait bien avec lui, il était une véritable oasis.

Ce n’était résolument pas simple d’aborder ce sujet. Même à ce jour, elle se trouvait particulièrement sensible à ces souvenirs. Il faut dire qu’ils avaient cruellement marqué son esprit, sa chair, son cœur. Elle pouvait sentir son cœur battre fortement dans sa poitrine. Il se trouvait oppressé, confiné dans sa cage thoracique. En parler, l’avouer à cœur ouvert à son actuel amant la troublait cruellement. Elle avait beau avancer, sa tristesse et ses regrets se trouvaient là malgré tout. Il en avait conscience, Yong Woo ne pouvait l’ignorer en vue de ce qu’elle venait de lui avouer. En fin de compte, ils partageaient la même blessure, la même peine. C’est sans doute pour cela qu’ils se comprenaient aussi bien et que leur relation lui semblait si bienfaisante pour son cœur meurtri. Sa présence, sa douceur et son humour étaient une véritable oasis pour la jeune femme. Elle se sentait cruellement bien avec lui. Tout était si simple et sans prise de tête. C’est ce qu’elle avait aimé dès le début de leur rencontre et le feeling qu’ils avaient, cette complicité qui s’était si naturellement développée, lui faisait prendre conscience qu’elle se trouvait attachée à cet homme. Elle était heureuse de l’avoir à ses côtés et avait envie de lui dire, lui déclarer dans une certaine mesure tout le bien-être et la chaleur qu’il lui faisait connaitre.

Sans doute que cela était inutile ? Peut-être. Il était évidant qu’ils tenaient tendrement l’un à l’autre. Elle était néanmoins ravie d’être en mesure de lui avouer cela, sans gêne, en toute sincérité. Elle avait craint sa réaction, mais dans son regard et ses gestes, il n’y avait nul mouvement de rejet. Au contraire, il l’observait avec douceur en caressant sa main. Il avait même répondu à son baiser. Il semblait touché par ce qu’elle venait de lui dire et il lui en fit part. Il était heureux de pouvoir la réconforter un peu. Il ne pensait pas faire grand-chose pour cela, mais il comprenait, car elle l’apaisait également. Elle lui redonnait confiance en lui, aux autres et en l’amour. Elle lui ouvrait de nouvelles perspectives, de nouveaux projets et il avait la sensation de retrouver un avenir avec elle. Shana se trouvait touchée par ses mots, ses prunelles se troublaient par de douces larmes d’émotions. Il était heureux de l’avoir et de pouvoir la soutenir, plus encore désormais qu’elle s’était confiée à lui. Il n’avait pas de réels conseils à lui donner. Tout le monde fait des erreurs et il arrive parfois qu’on blesse les gens qu’on aime sans le vouloir. Il ne savait pas si c’était vraiment comparable, mais parler avec Yasushi l’avait aidé à accepter ce qu’il avait pu faire, lui dire. Cela lui avait permis d’avancer en plus d’être avec elle. Il lui murmurait que si elle pouvait comprendre son cousin, peut-être qu’elle pourrait avancer plus facilement, mais je suppose que ce n’était pas si simple.

En effet, ce n’était pas si évident pour elle. Elle était encore bien trop sensible vis-à-vis de tout cela. Elle n’était pas encore en mesure de surpasser sa blessure pour tenter de comprendre Joaquin. La seule chose qu’elle savait, c’est qu’il avait laissé un trou béant dans son cœur sans qu’elle ne puisse réellement s’en relever. C’était trop difficile et elle n’avait pas encore la force d’y parvenir. Elle se laissa câliner, savourant le contact chaud et bienveillant des bras de Yong Woo. Elle se sentait bien contre lui, son cœur se sentant moins lourd près de lui. Elle se laissa embrasser la joue, le regard troublé tandis qu’il lui murmurait doucement qu’il s’était éloigné de Yasushi sans qu’il en saisisse réellement la raison. Du moins, il pensait qu’il l’avait compris, mais cela n’avait pas été le cas. Comme cela lui faisait mal et qu’il en avait eu honte, il s’était braqué dans le silence. Il ne voulait plus avouer à personne alors quand ceux qui connaissaient notre relation cherchaient à comprendre, je les envoyais balader férocement. Il était alors un peu rebelle. Il pensait qu’il ne comprendrait pas, qu’il se moquerait de lui ou qu’il ne voulait tout simplement l’entendre dire cela. Puis il devait reconnaitre qu’il avait voulu oublier. De ce fait, cela n’avait pas de sens s’il le disait à tout le monde. Il se mordait les lèvres, un peu gêné. Shana le regardait avec émotion et laissa une de ses mains caresser sa joue.

« Cela n’a pas dû être une période facile, autant pour toi que Yasushi. J’imagine ce que tu as pu vivre, mais je ne pourrais jamais en avoir réellement conscience… » Elle soupira doucement en continuant de glissait ses phalanges sur son visage. Son regard se faisait mélancolique en dépit de son fin sourire. Elle inspirait profondément pour ravaler ses larmes. « J’espère être un jour en mesure de pardonner à Joaquin. J’aimerai que cela soit possible, mais c’est trop tôt… bien trop tôt. Je n’arrive pas à le voir sans ressentir ce trou béant dans ma poitrine. C’est encore trop récent. Je crois qu’il me faut encore du temps pour tourner la page… sur ce sentiment qui m’a détruit de l’intérieur, il y a un an. J’ai besoin d’avancer encore un peu, de grandir même. J’ai peur de la vérité, de ce qu’il pourrait me dire. En fait, ça me tétanise totalement. » Elle se mordit la lèvre, les larmes aux yeux alors qu’elle venait se serrer contre Yong Woo. Elle se sentait légèrement tremblante contre lui, ayant besoin de cette douceur qu’il ne vint nullement lui refuser. « Mais je veux croire cela possible. Avec toi à mes côtés, j’avance petit à petit. Je verrai bien par la suite… Dans tous les cas, je suis heureuse que tu aies pu avancer, faire face à tout cela et que tu aies pu te réconcilier avec Yasushi. » Elle laissa ses lèvres déposer de doux baisers sur la nuque de son compagnon, murmurant doucement.

« Merci également de m’en avoir parlé, cela me touche profondément. Je suis heureuse d’être avec toi. » Elle sourit, son regard se faisant moins tremblant, empreint de larmes muettes. Elle le détaillait avec affection alors qu’elle dégageait son visage dans un geste tendre. « Après toutes ses émotions, que dirais-tu de nous préparer ses fameuses pizzas. Je meurs de faim. » Elle vint rire délicatement en venant l’embrasser tendrement. Elle ne voulait plus songer à tout cela. Elle était heureuse qu’il l’accepte telle qu’elle était. C’était la seule chose qu’elle désirait retirer de cela. Elle avançait à son rythme, grâce à lui. Il fallait juste être patient.